Cette journée mémorable avait commencé comme les autres : comme chaque matin, depuis ces 4 dernières semaines écoulées : réveil en état de fatigue extrême, petit-déjeuner forcé, au bord de la nausée...puis retour au lit pour tenter de supporter la digestion qui, à elle seule, nous épuise ! Quel dommage d'être incapable d'apprécier ce bel hôtel, avec sa superbe baie vitrée dans la salle à manger du 6e étage !
La matinée, entre nos somnolences, se passe pour moi, à essayer de persuader mon fils d'accepter que nous allions nous faire soigner à Singapour. La situation devenant critique, surtout pour moi, je le sens. Adc refuse pour lui tout en approuvant que je m'y rende seule...
Comment une mère pourrait-elle abandonner son fils, même à 20 ans, dans l'état où il est lui-même, alors qu'il "résiste" à peine mieux, en apparence ?
Je continue mon chantage en disant que s'il a décidé de se laisser mourir, je ferai la même chose.
L'après-midi s'est lentement déroulée entre tentatives de balades vers le port, accès à Internet via le Cyber café, et, comme chaque jour, essayer de rentrer rapidement dès les premières douleurs dans les reins pour moi, ou les premiers frissons pour Adc. Je pense que nous ommes rentrés vers 17 h.
A 19 h 40, la nuit tombée, alors que, terrasée par ma crise et encore très faible, je dormais profondément, mon fils m'a brutalement réveillée en hurlant : "Vite, vite ! lève-toi ! c'est un tremblement de terre !" En effet, mon lit tremblait et j'entendais la panique dans les couloirs. Je n'ai pensé à rien d'autre qu'à suivre Adc qui me tirait la main avec impatience.
-Même pas pris ma précieuse "banane" contenant toute ma vie (passeport, cartes crédit, argent) et tous mes souvenirs (appareil photo, caméscope ,nombreuses cartes mémoires bien pleines).
-Même pas mis mes tongues !
Nous quittons rapidement notre chambre, Adc me tirant toujours par la main. J'étais donc pied nus, en chemise de nuit avec un drap autour du corps que j'avais arraché du lit en partant. Ma crise ne semblait pas terminée, en fait, car mon corps tremblait de froid en lui-même autant que le sol de l'immeuble.
Une marche de l'escalier se brise en morceaux. Les gens du dernier étage, qui semblaient avoir ressenti plus violemment les secousses et les balancements de l'édifice étaient hystériques et semblaient, en nous bousculant, vouloir nous précipiter par dessus la rambarde ou bien nous piétiner dans les escaliers !
Finalemnt, nous nous retrouvons dans la rue. Et je suis pieds nus !!! dans cette rue répugnante où je ne circule qu'en chaussettes et baskets, tellement je suis dégoùtée par les immondices qui y trainent !
Des Chrétiens Evangélique lèvent leurs paumes vers la façade de l'immeuble et prient...ça a quelque chose de réconfortant.
Adc avait rendez-vous avec des jeunes à l'autre bout de la ville. Il veut y aller malgré les circonstances, car tout le monde attend les nouvelles secousses, les Indonésiens étant des habitués de ces évènements. Je supplie mon fils d'abandonner ses projets. Pas pour ma propre sécurité mais...comment pourrais-je le retrouver dans les décombres de cette ville tentaculaire qui m'est totalement inconnue si une secousse plus grave arrivait, comme tout le monde le suppose ? Il a tenté de téléphoner à ces jeunes mais le taxiphone ne fonctionnait plus. Il renonce finalement à les rejoindre. je lui suis très reconnaissante : l'angoisse aurait été horrible pour moi, puisque, durant cette mémorable nuit, 26 petites secousses se sont succédées ! facile à repérer : après notre retour dans notre chambre, nous avions posé une bouteille d'eau sur notre table de nuit et chaque vibration étaiçt nettement visible et angoissante : Devait-on redescendre ou non ???
Pendant toutes ces heures hallucinantes, je suis restée allongée sur mon lit, ma banane autour des reins et mes baskets aux pieds !
Je n'avais qu'une hâte : que le jour se lève, bien qu'il nous soit impossible de le voir par notre fenêtre aveugle, rendant l'atmosphère encore plus inquiétante.
A suivre...